Compte-rendu d'une rando sur la Voie Verte en Bourgogne
par K-Lain


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mardi 21 août 2001 - 18:58
De : Alain Korkos
A : sophie.cl





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et des informations
pratiques : cliquez ici


Des milliers de kilomètres
de voies vertes :
http://xsfred1.free.fr/roller/VoieVerte.htm

CR DE LA RANDO SUR LA VOIE VERTE

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SAMEDI 4 AOUT 2001

7H07 : Rongés par l'inquiétude et le menton grignoté par une barbe naissante, Deuz et K-Lain, plantés sur le quai n°2 de la Gare de Lyon, dégainent leurs portables :
- Allô XSFred, t'es où ?
- Allô Alex, t'es où ?
- Heu... Dans mon lit ? Ah non pardon, j'suis au bout du quai avec XSFred, préviens le conducteur qu'on arrive, chéri !

7H10 : Le train part avec des vrais morceaux de nous quatre dedans. La température extérieure est de 18°, le temps est menaçant, nous sommes déjà hagards (de Lyon, bien sûr) après une nuit trop courte.

8H15 : Dehors, il pleut. Nous songeons déjà à l'aspect plus "bistrot" que "rollo" de notre rando. Une ravissante contrôleuse Seuneuceufeu survient, presque aussi belle que celle qui avait poinçonné nos billets lors de notre précédente expédition vers l'île de Ré que certains ont encore rêvé d'elle, que les draps s'en souviennent. Le Deuz essaie de l'embrouiller grave en lui expliquant qu'on a changé de place et que par voie de conséquence et de Tège, le numéro attribué sur le billet n'est pas le bon mais que c'est pas grave, hein madmouazelle que c'est pas grave, dites ? sauf que la contrôleuse, elle s'en tamponne : la contrôleuse elle poinçonne pendant que le K-Lain déballe un cake aux fruits mais hélas pas au citron comme seule sait les faire Lafiço, que nous trempons dans des expressos (expressi ?) fournis par le bar de la Ouorlde Companie des Ouagons-Lits Couque où l'Alex alias La Baronne et le XSFred s'étaient précédemment rendus, ce qui n'était pas vraiment le fruit du hasard et peut-être même y avait-il là de la préméditation. Faut pas croire, y'en a, dans la tête d'un en-ligneur. Voui voui. Foi de quouadeur.

8H40 : Le Deuz est inquiet, il ne voudrait pas rater l'arrêt en gare de Mâcon-Loché. Pour ne pas le stresser davantage, nous nous dirigeons vers la sortie pendant que la pluie continue de s'abattre violemment sur la campagne environnante qui environne un peu trop près du train à notre goût.

8H45 : Le train s'arrête en gare de... Mâcon-Loché, deux minutes d'arrêt ! Mais la porte refuse obstinément de s'ouvrir et ce n'est pas une blague. Celle de la voiture suivante est tout aussi bloquées et bientôt, la sonnerie annonçant le départ retentit. Damnaide ! Une jeune fille qui veut également descendre (quelle idée bizarre, elle n'est pas encombrée de rollos !) se saisit de son portable, téléphone à toute vitesse et à son ami qui l'attend fébrile dans la gare. Grâce à eux, le train patientera le temps que la contrôleuse, de plus en plus charmante, débloque les portes avec sa clé miracle. Et c'est ainsi que nous nous retrouvons sur le quai pendant que le Tège s'éloigne vers des contrées aussi bizarre que suisses, vers Genève. Nous remercions la jeune fille et son ami, nous dirigeons maintenant vers l'arrêt du car Seuneuceufeu. Il pleut toujours.

9H10 : Le car Seuneuceufeu vient d'arriver, nous grimpons dedans et il démarre aussi sec (façon de dire, vu ce qui tombe dehors), avec une poignée de minutes d'avance. Le chauffeur se prend pour Choumachère et la valoche à roulettes clâssieuse du XSFred, posée dans le porte-bagages au-dessus des têtes de nos vaillants randonneurs, atterrit sur la main du K-Lain et lui nique trois doigts. La scoumoune...

9H15 : Le car Seuneuceufeu se gare sur le parquigne Seuneuceufeu de Mâcon-Ville, le chef de gare Seuneuceufeu surgit et engueule Choumachère qui est contraint de retourner à Mâcon-Loché vu que dans son départ précipité en pôle position, il a oublié une petite cargaisons de pèlerins en route pour Taizé (de cela, nous reparlerons).

9H35 : Les joyeux randonneurs arrivent enfin à Cluny alors qu'ô miracle, que la pluie cesse. Ils cherchent un bistral, le trouvent vu qu'ils ont le flair pour ça, c'est pas pour rien qu'ils sont des piliers de la RAFRSR, s'écroulent en terrasse, commandent trois cafés et un chocolat pour le Deuz, baffrent des énormes croissants et de gigantesques chaussons fourrés aux framboises qui font de grosses taches sur les Zadidasses noires du XSFred. Aux tables avoisinantes du bistral qui s'appelle "Le Paris", des retraités nettoient avec application une escadrille de ballons de blanc et de rosé remplis par un serveur qu'on a dû bercer trop près du mur, à moins que les ravages de l'alcool aient contaminé les gènes que lui ont aimablement transmis ses parents suite à un rapport précipité dans une cuve de mâconnais. Enfin brèfle, non seulement il est un peu beaucoup demeuré, le gars, mais en plus il s'appelle Raymond. Y'en a qui cumulent.

9H40 : La confiture de framboises coule toujours sur les Zadidasses noires du XSFred. L'un des retraités, en chemise à carreaux et pantalon à larges bretelles, se lève péniblement et s'éloigne d'une démarche zigzagante. On dirait qu'il fait un "crazy" en slalom, sauf qu'il n'a pas de rollos aux pieds et qu'il est le seul à voir les plots. (Rappel de l'heure : 9H40 du mat !)

11H15 : Après dépose de nos bagages à l'excellllent Hôtel Moderne, nous rejoignons la fameuse, la tant rêvée, l'inespérée Voie Verte dont le fabuleux tracé bitumineux de 44 km démarre tout près de l'hôtel, situé fort judicieusement pile-poil en face de l'ancienne gare de Cluny. Allez Louïa !

11H16 : Un vent léger souffle dans nos chevelures ondulantes, nos roues tournent telles des horloges doublevédéquarantisées, c'est le pied.

11H31 : Nous roulons depuis un quart d'heure sur la piste détrempée, et le XSFred n'a pas attendu ce temps pour, grâce au compteur intégré dans son Truite+2 gauche*, établir des statistiques, dresser des graphiques en trois couleurs, faire de la futurologie rollèristique. Son jugement tombe comme une enclume dédélulesque dans la rando de Rollères & Coquillettes : - On est à 25 km/h de moyenne, on ne tiendra jamais toute la journée à ce rythme. Vous roulez trop vite, les enfants ! Pour bien gérer l'effort, il faut rester à 18 km/h ! C'est dur, je sais, mais vous y arriverez, allez. Toujours un tantinet paternaliste, le XSFred... Il faut dire que notre projet est grandiose : faire Cluny-Givry aller et retour dans la journée, soit 88 km. Y parviendra-t-on ? Zatize ze quouechtionne. [*  : un "Truite+2", c'est un TR-10, bien sûr.]

11H32 : Nous roulons depuis un quart d'heure+1 (voir ci-dessus), et nous avons déjà occis une bonne centaine de limaces s'évertuant à se jeter sous nos roulettes dans un mouvement suicidaire et collectif digne d'une secte solaire. Leurs pauvres petits corps en charpie forment une bouillie - ou plutôt une confiture rappelant le chausson aux framboises du XSFred - qui se colle sous les platines et s'insinue entre les roues. La confiture de limaces est-elle corrosive ? Zatize anozère quouechtionne.

11H 45 : On passe à la hauteur du village de Taizé où se trouve une communauté religieuse et où des tas des djêunes qui croient au Bon Dieu se réunissent périodiquement. Le K-Lain nous confie qu'il est souvent venu à Taizé dans sa jeunesse, vu que le teuche y a toujours été de bonne qualité et la jeune fille catholique ou protestante peu farouche sous la tente canadienne monoplace que c'est pas grave, on va se serrer, Dieu est amour, c'est quoi déjà ton prénom ? Ingrid ? Ah nan toi c'est Paola, pardon, alors Paola, tu mets ta jambe gauche ici et ta main droite là, ouais comme ça...

11H50 : Nous roulons sous l'ombre rafraîchissante dispensée par la frondaison. Un caillou, profitant de cette situation en demi-teinte, se positionne traîtreusement à l'aplomb d'une des roues avant du K-Lain quouadeur. Stoppé net dans cet allègre élan qui le propulsait en tête tel les troupes maoïstes à l'assaut de la valetaille vendue au capitalisme, le bitume lui saute sauvagement à la face avec une brutalité inégalée pour le moins contre-révolutionnaire. L'agression est caractérisée. Les avant-bras en sang, les genoux en compote, la cervelle mélangée dans la boîte crânienne et surtout le menton ouvert avec du sang tout partout et pas encore des vrais morceaux de caillots dedans mais ça va viendre. Pendant un moment, il ne sait plus trop où il habite, le K-Lain. Même qu'à un autre moment, il se demande s'il est toujours vivant.
- Pas "coule ine maille brenne", remarque-t-il amer.
- T'as pas été "euhouaire" sur ce coup-là, balance le XSFred.
- Heu... Ta gueule, Frédo, conclut La Baronne dans un élan de ferveur prolétaire.

12H30 : Après des soins de première urgence dispensés part le Deuz, la fine équipe arrive à la gare de Saint-Gengoux. Là, posés sur la pelouse, une petite bande composée d'un rollèremec et de trois rollèrenanas. Au bout d'un moment plus ou moins long, la Baronne reconnaît dans la triplette de donzelles l'une de ses anciennes keupines de classe du temps qu'elle habitait à Avignon-gnon. Alors elles discutaillent, elles se rappellent des mecs qu'elles se sont disputées, etc. Pendant ce temps, le K-Lain et le XSFred discutent avec les autres, qui sont tous d'Avignon et même d'"Avignon En Rollers" que c'est leur association à roulettes. On s'assoit, on partage des zabricots, on bavasse, on fait des tôphes, on se promet d'aller faire leur rando avignonaise du vendredi soir (on l'a faite, depuis) pendant que le Deuz est parti au village voir s'il y a un toubib et une pharmacie. Pasque l'air de rien, le K-Lain est toujours en pleine hémorragie. Mais pas une plainte, rien, il assuràdonf... Eh ouais !

13H45 : Les trois mousquetaires de la roulettes rejoignent la pharmacie du bled. La pharmacienne nettoie la plaie béante du K-Lain, et lui conseille d'attendre l'arrivée du toubib local qui sera là dans un quart d'heure.
- Au quai, merci m'dame, qu'il répond le K-Lain.

14H15 : Le toubib local arrive avec un quart d'heure de retard dans une Béhaimedoublevé gris métallisé avec l'accroche de caravane derrière, le top du top de la beauferie. Le K-Lain le suit dans son antre, et là commencent les soins : le jeune disciple d'Hippocrate plante sans ménagement deux agrafes dans le menton du K-Lain stoïque, ne lui nettoie même pas les bras ensanglantés, l'assomme de grosses vannes crétines et lui prend 245 balles. En facturant l'agrafe à 122,50 F, on comprend maintenant comment certains gugusses peuvent s'acheter une Béhaime dans laquelle ils baladent bobonne en jupe écossaise et serre-tête de velours bleu avec les moutards en bermudas à carreaux le dimanche, et leur maîtresse la semaine.

14H22 : On rejoint un bistral situé en face d'une charmante petite église où l'on nous sert des croque-monsieurs congelés. Le patron dudit bistral doit être copain avec les retraités du "Paris" de Cluny où l'on avait pris notre p'tidéj, vu qu'il est à peu près dans le même état qu'eux : il slalome en arrière sans s'en rendre compte, tu lui mets des M aux pieds, il enterre tout le monde à PR...

15H30 : On s'arrache, on reprend la piste. On roule, on roule, on roule en petit train. On s'arrête pour faire des tôphes...



puis on redémarre, on roule, on roule, on roule en petit train.

17H : On arrive à Buxy qui n'est qu'à neuf kilomètres de notre but ultime, mais le K-Lain a été un peu sonné par sa brève prise de bec avec le bitume, le Deuz a mal aux pinceaux et la Baronne a des faiblesses. Or donc, seul le XSFred décide de continuer. Les trois précédents s'étalent à la terrasse d'un bistral (encore !) pendant que le dernier nommé s'en va à l'assaut de la piste qui va savoir qui c'est Raoul !

17H50 : Les trois mousquetaires sont toujours attablés, Raoul d'Artagnan revient dans un état hésitant entre le "pas frais" et le "franchement décomposé" vu qu'il s'est torché dix-huit bornes en cinquante minutes, ce qui lui fait un total de cinquante-trois bornes dans les guibolles depuis le matin sans compter notre incartade de deux ou trois kilomètres à la recherche du toubib en Béhaimedoublevé gris métallisé avec l'accroche de caravane derrière, qu'il manquait quand même la balle de tennis fichée dedans et le pare-soleil autocollant "Jean-Claude" collé sur le pare-brise pasque c'est de mauvais goût.

18H15 : On repart. On roule en petit train. Même qu'on pourrait appeler ça "Le Petit Train des Zombis - le Retour" vu qu'au plus qu'on roule, au plus qu'on est nazes. Deux kilomètres avant Taizé, une bande de djêunes allemands est étalée au beau milieu de la piste. Ils se poussent un peu à notre approche, mais pas assez : le quouade droit du K-Lain (encore lui ! ) bute sur le pied de l'un des Teutons et patatras ! il se viande encore ! Il se relève, un tantinet énervouillé. Il veut imprimer la marque de ses quouades dans la tronche du Teuton tétanisé, mais l'autre et ses acolytes, complètement alcoolisés ou enfumés (c'est le syndrôme de Taizé expliqué plus haut), amorphes, rappellent les limaces du matin. La Baronne calme le K-Lain, et la petite troupe repart. Ya pas à yésch, c'est pas la journée au K-Lain...

19H : "Le Petit Train des Zombis - le Retour" roule...

20H : "Le Petit Train des Zombis - le Retour" roule...

21H : "Le Petit Train des Zombis - le Retour" arrive à Cluny, avec 90 ou 95 bornes dans les guibolles, le compteur du XSFred n'est pas très fiable amis il a décidé de s'acheter un compteur de pulsations cardiaques, ce qui va 'achtement nous avancer. La Baronne et le K-Lain conduisent les ouagons jusqu'à la brasserie face à l'abbaye, là même où ils avaient pris un pot l'année précédente. Les zombis dînent en torchant leur assiette et en se léchant les doigts puis rejoignent leur hôtel.

22H30 : Les zombis s'installent dans leurs chambres. Dans celle de la Baronne et du K-Lain, il y a des espèces de coussins accrochés à des tringles au-dessus des lits jumeaux, qu'on se demande pour quoi c'est faire. En tout cas, ça ampute les plumards de quelques centimètres utiles qui font que les pieds du K-Lain vont pendouiller à l'extérieur. Les deux zombis considèrent cette situation comme intolérable. Aussi, la Baronne entreprend de pousser les oreillers suspendus vers les tables de nuit pendant que le K-Lain opte pour les grands moyens : ils sort le tournevis à têtes multiples, enclenche la cruciforme, commence à démonter la tringle fixée dans le mur. On va voir qui c'est Raoul ! Sauf que la Baronne embrumée, soudain traversée par un éclair de lucidité, décide de tirer les plumards afin de les décoller du mur et des oreillers suspendus. - Mouais, ronchonne le K-Lain de mauvaise foi, c'est un peu une solution de facilité, hein ! Mais bon...

23H : Après la douche, extinction des feux. Le K-Lain appuie sur le bouton éteignant la lumière, s'endort avant d'avoir posé la tête sur l'oreiller. Et la Duchesse aussi, qui s'est enfoncé des boules "Qui est-ce" dans les esgourdes. Dans l'autre chambre, le Deuz cause au XSFred pendant quelques minutes, jusqu'à ce qu'il se rende compte que ledit XSFred roupille à poings fermés.

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DIMANCHE 5 AOUT 2001

10H30 : Après un excellentissime p'tidéj à l'Hôtel Moderne, les zozos décident d'opérer un petit décrassage. Ils chaussent et repartent sur la piste, jusqu'à un bistral situé à Massilly - à cinq kilomètres de là - où ils reprennent un caoua. Et puis ils s'en retournent. Faut pas abuser de la roulette.

12H : Les zozos s'installent dans le resto du génial Hôtel Moderne, bavent devant la carte et s'offrent un repas somptueux dans le genre foie gras frais poêlé, filet mignon de porc aux poires et au miel, pinard local de bonne facture et café liégeois.

13H45 : Les zozos prennent le car Seuneuceufeu qui les conduit à la gare de Mâcon-Loché. Dans le véhicule bondé comme un métro à 18h, une foule de djêunes et de djêunettes Ingrid et Paola échappés de Taizé, les yeux pleins de l'amour de Dieu (voir explication plus haut).

14H50 : Les zozos s'installent et somnolent dans le Tège.

16H25 : Les zozos débarquent sur le quai de la Gare de Lyon et chaussent immédiatement les rollos pour rejoindre la rando Rollères & Coquillettes à Bastille !

16H35 : Arrivés à Bastille, ils apprennent que la rando fut annulée pour cause de menace de pluie. Alors ils s'installent à la terrasse d'un bistral du boulevard Bourdon. Normal. Les yeux dans le vague, ils repensent à leurs récents exploits, se repassent le film dans leur tête en Cinémascope Technicolor et Dolby Stéréo.
Ce fut un beau ouiquinde.

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